

Les maladies cardiaques sont la principale cause de décès et d’invalidité à l’échelle mondiale. Or, un grand nombre de personnes négligent de prendre des mesures essentielles pour se protéger après avoir subi un incident cardiovasculaire, tel qu’une crise cardiaque ou un accident vasculaire cérébral (AVC).
Une récente étude met en lumière un enjeu pressant pour les patients atteints d’une maladie cardiovasculaire athéroscléreuse (MCVA). Même s’ils suivent un traitement par statine, bon nombre de ces patients excèdent quand même les niveaux de cholestérol recommandés. Cela les expose à un risque considérable d’incidents cardiovasculaires récurrents, tels qu’une crise cardiaque ou un AVC. En fait, un patient sur cinq patients a subi un autre incident cardiovasculaire quand leur taux de cholestérol LDL est demeuré supérieur au seuil recommandé pendant qu’ils suivaient un traitement par statine.
« C’est réellement important de connaître votre taux de cholestérol, surtout si vous avez déjà subi une crise cardiaque ou un AVC », explique Dr Shaun Goodman, co-auteur de l’étude et chef adjoint de la division de cardiologie à l’hôpital St. Michael. « Des niveaux élevés de mauvais cholestérol peuvent s’accumuler dans les artères et mener à un deuxième incident potentiellement mortel. »
« Au cours des deux dernières décennies, le domaine de la médecine cardiovasculaire a beaucoup évolué, ce qui a mené à une réduction des incidents cardiovasculaires », affirme-t-il. « Cela dit, l’adoption de certaines mesures complémentaires à l’abaissement du taux de cholestérol sera essentielle, dans l’avenir, à la diminution du risque de maladies cardiovasculaires. »
Première partie de l'entrevue avec le Dr Shaun Goodman
Je m'appelle Dr Shaun Goodman.
Je suis chef adjoint de la division de cardiologie à l'hôpital Saint Michael et professeur à l'Université de Toronto.
Ce qui m'a intéressé à ce domaine, c'est le fait que les maladies cardiovasculaires sont la principale cause de décès et d'invalidité dans le monde, J'espère contribuer à la réduction de ce risque.
Je crois qu'il est vraiment important de continuer à promouvoir la recherche, car nous devons trouver des solutions additionnelles sécuritaires et efficaces pour réduire le cholestérol et diminuer le risque d'événements cardiovasculaires.
Cela dit, il faut aussi déterminer les meilleures façons d'offrir ces traitements aux patients, de sorte qu'ils puissent en tirer parti.
Je pense que l'un des plus grands défis auxquels font face les médecins est que les patients ne sont pas toujours facilement convaincus que cette condition silencieuse peut mener à de nombreux problèmes à long terme.
C'est réellement important, surtout pour les personnes qui ont déjà subi une crise cardiaque ou un autre incident cardiaque grave, de connaître et de gérer leur taux de cholestérol.
Nous savons que les personnes atteintes d'une maladie cardiaque ne savent souvent pas que leur taux de mauvais cholestérol est élevé.
Alors une fois de plus, la sensibilisation et le contrôle d'un taux élevé de mauvais cholestérol sont cruciaux pour éviter des problèmes à l'avenir.
Nous avons récemment eu l'occasion d'observer des patients canadiens dans le cadre d'une étude qui comparait ceux qui avaient un taux de cholestérol élevé après, par exemple, une crise cardiaque, à ceux qui, après une crise cardiaque, ont réussi à diminuer leur taux de cholestérol avec un traitement approprié.
Les personnes qui n'étaient pas parvenues à réduire leur taux de mauvais cholestérol présentaient un risque deux fois plus élevé de subir un autre incident cardiovasculaire.
Si vous avez subi une crise cardiaque ou un AVC, vos risques de subir un autre incident sont considérablement supérieurs, surtout si votre taux de cholestérol demeure élevé. « Dans notre étude, nous avons découvert que les patients dont le taux de mauvais cholestérol était demeuré élevé après un incident cardiovasculaire couraient presque le double du risque d’en subir un autre, comparativement à ceux dont ces niveaux avaient été adéquatement gérés », explique Dr Goodman.
Que pouvez-vous faire? Dr Goodman insiste sur l’importance d’être proactif. Commencez par connaître votre taux de cholestérol LDL (cholestérol à lipoprotéines de basse densité) et collaborez avec votre médecin pour l’abaisser. Selon la recommandation, vous devriez le ramener en deçà de 1,8 mmol/L; toutefois, selon Dr Goodman, « si vous avez subi un incident cardiovasculaire, vous devriez viser à réduire le plus possible votre taux de cholestérol LDL, le mauvais cholestérol. »
Outre les traitements médicaux, les changements de mode de vie peuvent grandement contribuer à ces efforts. L’adoption d’une alimentation saine pour le cœur, l’activité physique et la gestion du stress peuvent toutes jouer un rôle dans l’amélioration des niveaux de cholestérol et de la santé cardiaque globale.
Deuxième partie de l'entrevue avec le Dr Shaun Goodman
À mon avis, l'un des gestes les plus importants que nous pouvons poser, c'est d'encourager les patients à revendiquer leurs propres besoins.
Nous constatons que dans ce travail d'équipe qu'est le suivi des patients après une crise cardiaque pour réduire leur taux de mauvais cholestérol, il y a de nombreux intervenants, et le patient demeure l'élément central.
Nous souhaitons qu'ils connaissent leurs taux et consultent leurs fournisseurs de soins de santé pour s'assurer que leurs taux atteignent le niveau le plus bas possible.
Après un incident cardiovasculaire, la plupart des patients se sentent assez bien et ne savent peut-être pas que leur taux de cholestérol est trop élevé.
Ils doivent donc contacter leur clinicien et subir un test de vérification du cholestérol de quatre à six semaines après, et tenir une discussion avec cette personne concernant le traitement à suivre pour réduire leur cholestérol.
En plus des traitements, les gens peuvent prendre diverses mesures pour réduire le risque de subir un autre incident cardiovasculaire.
Ils peuvent notamment modifier leur mode de vie en faisant plus d'exercice, en surveillant leur alimentation.
C'est toutefois important d'apporter seulement de petits changements qu'ils pourront maintenir.
Ce n'est pas tout ou rien.
Je crois que les patients doivent revendiquer leurs propres besoins.
Ils devraient obtenir des soins médicaux, surveiller leur taux de cholestérol, et apporter des changements à leur mode de vie, dont leur alimentation et leur activité physique.
Cela dit, ils doivent être en mesure de maintenir les modifications qu'ils adoptent au fil du temps.
Oui, les médecins ont certaines difficultés à suivre les lignes directrices.
Il y a l'abondance de nouveaux renseignements, qui prennent un certain temps à se rendre aux cliniciens, puis à leurs patients.
Le problème de l'écart thérapeutique tient au fait que de nombreux cliniciens et patients ne sont pas au courant des renseignements les plus récents et des dernières lignes directrices.
Par conséquent, il faut compter un certain temps avant que ces personnes puissent adopter les mesures, qui, comme nous le savons maintenant, représentent la meilleure voie à suivre.
Par exemple, il y a un écart entre les mesures qui devraient être adoptées pour ramener le cholestérol LDL sous la barre des 1,8 millimole par litre.
À mon avis, la principale source d'irritation réside dans le temps qu'il faut compter avant que les preuves et les lignes directrices recommandées se concrétisent dans la pratique clinique.
Chez les patients canadiens, nous avons observé que ceux dont le taux de mauvais cholestérol demeurait supérieur à la cible recommandée risquaient de subir un autre incident cardiovasculaire.
Les recherches ont produit d'excellents traitements qui ont démontré leur capacité à réduire les risques d'incidents cardiovasculaires, mais ceux-ci ne sont pas encore régulièrement utilisés en pratique.
Je crois que cela s'explique par le temps qu'il faut aux cliniciens et aux patients pour être au courant des nouveaux renseignements en émergence.
Dr Goodman encourage les fournisseurs de soins de santé à rester au courant des nouvelles lignes directrices et à donner priorité à l’éducation de leurs patients. Par exemple, même si ces derniers se sentent bien après un incident cardiovasculaire, les médecins devraient leur communiquer que leur taux de cholestérol pourrait quand même être trop élevé. « L’un des principaux défis, pour les médecins, réside dans la difficulté de convaincre leurs patients que ce trouble médical silencieux pourrait mener à de nombreux problèmes dans l’avenir », ajoute Dr Goodman.
Troisième partie de l'entrevue avec le Dr Shaun Goodman
À mon avis, le principal point à retenir pour les personnes qui ont subi un incident cardiovasculaire est de réduire le plus possible leur taux de cholestérol LDL.
Le seuil de 1,8 millimole par litre que la Société cardiovasculaire du Canada recommande actuellement n'a rien de magique.
Il a changé au fil du temps et diminue progressivement chaque fois que les lignes directrices sont révisées.
Donc, essayez d'abaisser vos risques en réduisant le plus possible votre cholestérol LDL.
Pour les fournisseurs de soins de santé, le principal point à retenir est que, même si la majorité des patients se sentent bien, leur taux de cholestérol LDL, le mauvais cholestérol, pourrait être obstinément élevé.
Donc, pour réduire le risque, c'est important de vérifier plusieurs fois le taux de cholestérol.
Je crois que la médecine cardiovasculaire a beaucoup évolué au cours des deux dernières décennies, et je suis ravi d'avoir participé aux initiatives de réduction du cholestérol LDL, lesquelles ont mené à la diminution du taux d'incidents cardiovasculaires.
Cela dit, certains traitements, tels que les traitements anti-inflammatoires, font complément à ceux axés sur la diminution du cholestérol LDL et représenteront, à mon avis, la voie de l'avenir pour la réduction du risque de maladies cardiovasculaires.
Pour l'avenir des soins de santé cardiaques, j'espère que tous les excellents renseignements que nous détenons se traduiront dans la pratique clinique.
Pour ce faire, il faudra encourager les patients à revendiquer leurs propres besoins et à collaborer avec leurs fournisseurs de soins de santé pour être en mesure de réduire leur risque de maladies cardiovasculaires.
La santé cardiaque consiste dans un partenariat entre les patients et les praticiens. « Les patients doivent revendiquer leurs propres besoins », explique Dr Goodman. « Demandez à votre médecin de vérifier vos niveaux de cholestérol, obtenez des soins médicaux et modifiez votre mode de vie. Commencez par de petits changements que vous serez en mesure de maintenir. Ce n’est pas tout ou rien. »
Quant aux cliniciens, ils devraient concentrer leur attention sur les écarts thérapeutiques en traduisant leurs recherches en actions. Selon Dr Goodman, les outils de prévention des incidents cardiaques récurrents sont vastement disponibles, mais l’enjeu consiste à faire en sorte qu’ils soient efficacement utilisés pour sauver des vies.
La protection du cœur est un engagement à vie. Que vous soyez un patient ou un fournisseur de soins, l’adoption de mesures proactives aujourd’hui peut mener à des lendemains plus sains.